Voxa Direct : Entreprise de vélotypie

Entretien Sylvia et Lauriane, les fondatrices de Voxa Direct, entreprise hérouvillaise de vélotypie qui a été récemment mise en lumière à l’échelon national lors d’une intervention télévisée en direct du Président de la République. 

Pouvez-vous vous présenter en quelques mots ?  

Sylvia : Bonjour, je suis Sylvia Costy, vélotypiste depuis 20 ans et co-gérante de Voxa Direct depuis sa fondation en 2018.  

Lauriane : Bonjour. Lauriane Lecapitaine, co-gérante de Voxa Direct. Cela fait une douzaine d’années que je suis vélotypiste, et nous avons démarré en même temps avec Sylvia, la société Voxa Direct. 

Comment est né Voxa Direct, et pourquoi avez-vous choisi ce nom ?  

Sylvia : le mot latin « voxa » signifie la voix. Et « Direct », c’est pour dire que nous travaillons en direct. Nous avons travaillé ensemble une quinzaine d’années comme vélotypistes, nous voulions travailler à notre propre compte avec des valeurs communes. C’est la raison pour laquelle nous avons décidé de nous associer et de créer Voxa Direct.

Parlons maintenant de la vélotypie. En quoi consiste ce métier ?  

Lauriane : C’est un système de sous-titrage en direct qui se pratique avec un clavier spécifique qui permet d’écrire à la vitesse de la parole. Le clavier est très différent du clavier Azerty: il comporte des touches qui permettent d’appuyer sur plusieurs lettres en même temps. On fait des accords de lettres si bien que les mots défilent très vite. 

Un peu comme les accords sur un piano ?  

Lauriane : Exactement. On associe les syllabes, ce qui donne un affichage lisse et régulier. 

Combien faut-il de pratique pour devenir un bon vélotypiste ?  

Lauriane : On devient vélotypiste et donc apte à sous-titrer des événements au bout de 12 à 18 mois de formation. Il faut compter au moins 2 ans pour être vélotypiste confirmé. 

Comment vous êtes-vous retrouvées à l’Élysée à transcrire l’intervention  du Président en mars 2020 ?  

Sylvia : Les services de l’Élysée connaissent déjà la vélotypie depuis plusieurs années. Ils en connaissent les avantages par rapport à tous les autres moyens de transcrire la parole en mots. La vélotypie est plébiscitée par les personnes malentendantes par rapport à toutes les autres techniques car elle est pratiquement simultanée à la parole. L’écart entre l’oral et l’écrit n’est que de 2 à 3 secondes. Avec les autres techniques, c’est parfois 10 à 20 secondes, ce qui rend impossible l’accès aux personnes malentendantes à compréhension des débats. Par exemple, en parlant des débats politiques, on comprendrait mal de voir apparaître à l’écrit les propos d’un candidat alors que c’est son adversaire qui est à l’image !

La rapidité du procédé de vélotypie fait que tout le monde a l’information en même temps, les personnes malentendantes ne sont pas exclues. 

Quelles sont les qualités qu’on peut exiger d’un ou d’une vélotypiste ?  

Sylvia : D’abord une très bonne connaissance de la langue française : l’orthographe, la syntaxe, la richesse de vocabulaire. Ensuite la gestion du stress puisqu’on intervient en direct, c’est presque à chaque fois l’inconnu. 

Puis la rapidité d’exécution. Même si on ne sait pas encore écrire sur le clavier, il faut montrer une dextérité, une rapidité à exécuter les gestes. Il faut aussi faire preuve de concentration, et avoir de bonnes capacités de mémorisation. 

Lauriane : Ce sont des qualités qui n’ont pas forcément de lien entre elles, mais elles ont toutes leur importance dans les prestations qu’on est amené à fournir.

Vous parliez de gestion de stress…Qu’avez-vous ressenti au moment du direct à l’Élysée ? Est-ce qu’on est dans le même état qu’un sportif  avant un grand match ? 

Sylvia : L’image du sport est une très bonne comparaison. Effectivement, même après des années d’expérience, il y a toujours un petit stress, qu’on appelle maintenant stress positif. Pour l’Elysée, c’est un peu particulier. Nous avons été averties le matin même que nous devions nous rendre à l’Elysée pour l’allocution du soir. Mais nous ne savions pas que c’était une allocution, et encore moins qu’elle passait sur les écrans de tous les Français ! 

Lauriane : C’est aussi comparable avec le spectacle. Le trac au début, et quand on est lancé, ça va de mieux en mieux. 

Après cette prestation à l’Élysée, avez-vous été plus sollicitées par des  institutions, des entreprises qui souhaitent s’attacher vos services ?  

Sylvia : Certainement. En plus de contrats déjà finalisés, nous avons été approchées par des professionnels qui se sont rendus compte de la plus value de la vélotypie dans la communication. Ils sont de plus en plus sensibilisés à l’accessibilité de leurs salariés, de leur public. 

Lauriane : La période de confinement, qui oblige à une communication à distance renforcée, incite aussi les élus et les dirigeants d’entreprise à s’intéresser davantage à l’accessibilité. 

Sylvia : Avec cette première à l’Élysée, le Président a lancé un message fort pour l’adoption de la vélotypie à plus grande échelle. Il y a eu quelques critiques de la vélotypie sur les réseaux sociaux car le direct ne va pas sans quelques ratés. Mais dans l’avenir, le public sera de plus en plus habitué à suivre la transcription en direct. 

Est-ce que ces nouvelles sollicitations ne vous mettent pas la pression  (comme chefs d’entreprise) de ne pas être en mesure de pouvoir y  répondre correctement? 

Sylvia : Pour le moment, nous pouvons répondre parfaitement à la demande. Le carnet de commandes correspond à notre effectif salarial. C’est vrai que cette demande va crescendo, mais tout n’arrive pas à la fois. Nous avons récemment recruté une jeune vélotypiste, Naomie, qui est en formation. Il y en aura d’autres. 

A plus long terme, comment voyez-vous l’avenir de Voxa Direct ?  

Sylvia : Nous souhaitons continuer de recruter, former pour répondre au développement du marché. On se rend compte aujourd’hui que le besoin des personnes sourdes et malentendantes est très fort. 

Lauriane : Dans la population qui devient de plus en plus âgée, les personnes malentendantes ne voudront pas changer leur façon de vivre et voudront continuer de recevoir l’information. Elles auront de plus en plus besoin de sous-titrage en direct. 

Un dernier mot pour conclure l’interview ?

Lauriane : Peut-être rappeler que le sous-titrage est un élément essentiel du confort des personnes sourdes et malentendantes. Seulement 20 % d’entre elles pratiquent la langue des signes.  

Sylvia : Mettre aussi en avant que la vélotypie est un progrès par rapport aux autres méthodes, comme la reconnaissance vocale ou la sténographie. 

L’intelligence artificielle ne nous concurrence pas, surtout en langue française. Autant la reconnaissance vocale a fait beaucoup de progrès en langue anglaise, autant elle peine à atteindre un niveau correct en français qui est une langue subtile, pleine de nuances et de pièges. 

Lauriane : La reconnaissance vocale peut suffire quand, dans une réunion, une seule personne est concernée par le sous-titrage, qui pardonnera plus facilement les erreurs et les coquilles. Mais pour un public plus large, c’est trop perturbant. 

Merci Sylvia, Merci Lauriane de nous avoir fait découvrir votre passionnant métier. 

 

8 Place de l'Europe, 14200 Hérouville-Saint-Clair

Rdv sur : www.voxadirect.com

Telephone : 02 61 53 64 10

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